vendredi 3 septembre 2021

Lupin ou le lecteur héros selon Netflix


Assane Diop utilise les méthodes d'Arsène Lupin pour se venger d'Hubert Pellegrini, l'homme responsable de la mort de son père.


Lupin est une série française Netflix qui utilise les bonnes ficelles pour se vendre à l'international : acteur principal connu sans être une star, visuel publicitaire pour Paris, rythme sériel peu exigeant mais ludique. Les éléments fonctionnent bien ensemble, c'est indéniable.

Il faut bien sûr en accepter les défauts : le côté "j'ai toujours un coup d'avance" peut lasser, tout comme la tentative de mêler attitude cool et gravité, où il est difficile de trouver un équilibre. Je passerai sur la stupidité de la police, argument scénaristique qui facilite beaucoup les choses selon les désidératas des scénaristes au détriment de toute vraisemblance. Bref, il est évident que la série a des qualités, mais aussi de gros défauts. Ce n'est pas vraiment l'objet de l'article. Je voulais plutôt partager avec vous une remarque sur un point particulier concernant l'écriture de Lupin.

 




Car la série a surtout une vraie force de mon point de vue : elle donne envie de lire. Du Maurice Leblanc d'abord, car les histoires d'Arsène Lupin sont présentes en filigrane dans la série. Elle les adapte, les triture, les retourne et rend curieux le spectateur intéressé par l'histoire. Le spectateur attentif peut même voir passer quelques éditions des romans de l'auteur dans la série.

Elle applique à la lettre le rythme feuilletonant qui a fait la gloire des Allain, Souvestre ou Leblanc. Rebondissement à chaque fin d'épisode, résolution dans le suivant etc. Tout y est et c'est ce qui rend souvent Lupin plaisante.
C'est le scénariste George Kay qui est à la manœuvre et il avoue n'avoir pas vraiment lu Arsène Lupin. Cette antinomie interroge sur la nature du projet à l'origine (dans ce cas, Lupin n'est qu'un prête nom connu, une franchise identifiée) et sur le résultat final, réarrangement d'éléments connus pour mener à la série qu'on connait. 

 


Surtout, la série parle des livres et des lecteurs en général. Les personnages lisent, parfois même ils trouvent la solution à leurs questionnements en lisant plutôt qu'en parcourant le net ou leur smartphone. Assane est un lecteur assidu d'Arsène Lupin et c'est grâce à cette qualité qu'il s'en sort dans ses aventures. Lecture que le héros partage avec son fils, qui lui aussi devient accroc au personnage de Leblanc au point de se déguiser comme le gentleman cambrioleur lors d'une visite d’Étretat. La série montre beaucoup de bibliothèques qui ne servent pas seulement de décorum, mais elles ont un vrai rôle dans le récit : parfois lieu de crime, elles deviennent des lieux où Assane planifie ses coups, voir un endroit crucial où recruter ses acolytes.

D'autres personnages cherchent à écrire (comme la journaliste Fabienne Beriot ou le commissaire Dumont, dont on apprend qu'il aimerait devenir écrivain de romans policiers). Les scénaristes ont glissé tout du long des références et des clins d'œil de ce type.



Voilà, Lupin se regarde bien et saura intéresser le spectateur à la recherche d'un divertissement sympathique, qui parle de lecture à l'heure où cette occupation est invisibiliser à l'écran. Et ça, c'est déjà pas mal !

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